La protection de l’enfance

Ce livret a pour but de vous aider à avoir une meilleure compréhension de base des notions de droit. Il ne remplace toutefois pas les conseils et l’aide d’un ou d’une avocate. Si vous avez des problèmes qui relèvent du droit de la famille, obtenez des conseils juridiques dès que possible afin de savoir quels sont vos choix et de protéger vos droits. Pour plus de renseignements sur la façon de trouver et de payer un ou une avocate, consultez « Comment trouver de l’aide pour régler un problème de droit de la famille ». Vous trouverez aussi d’autres ressources sur notre site web undroitdefamille.ca.

 En Ontario, c’est la Loi de 2017 sur les services à l’enfance, à la jeunesse et à la famille qui protège les jeunes et les enfants contre les mauvais traitements et régit leurs droits.

L’objectif de cette loi est de promouvoir « l’intérêt véritable de l’enfant », d’assurer sa protection et son bien-être. L’intérêt véritable de l’enfant est un concept juridique. Plusieurs facteurs sont pris en considération pour déterminer le meilleur intérêt de l’enfant.

Depuis le 1er Janvier 2018, tous les enfants âgés de 18 ans et moins sont protégés par la Loi.

Qu’est-ce qu’un ou une « enfant ayant besoin de protection »?

En principe, les parents sont responsables de la protection et du bien-être de leurs enfants. En effet, en tant que parent, vous devez protéger vos enfants contre les mauvais traitements et combler leurs besoins de base comme la nourriture et le logement.

Un ou une enfant a besoin de protection lorsqu’il ou elle :

  • est laissé sans surveillance et le père et la mère ne s’en occupent pas.
  • a été victime de mauvais traitements ou risque de l’être.
  • est témoin de violence entre adultes à la maison.

La maltraitance peut se manifester par de la violence physique, sexuelle ou psychologique ou le risque de violence physique, sexuelle ou psychologique. Les motifs de protection s’appliquent, quelle que soit la personne qui maltraite l’enfant. Lorsque votre enfant est victime de mauvais traitements, la Loi accorde le pouvoir aux sociétés d’aide à l’enfance (SAE) afin de prendre des mesures de protection.

Qu’est-ce qu’une Société d’Aide à l’Enfance (SAE)?

Le gouvernement finance des organismes de protection de l’enfance que l’on appelle généralement « sociétés d’aide à l’enfance » (SAE). La Loi leur accorde le pouvoir de mener des enquêtes sur le signalement ou toute autre preuve de mauvais traitements et de négligence à l’égard des enfants âgés de 18 ans et moins et de prendre lorsque cela est nécessaire, des mesures de protection pour assurer leur bien-être.

Leur rôle est d’aider les familles à demeurer ensemble et, dans les cas les plus graves, de retirer les enfants de leur foyer. Les SAE placent également les enfants en vue de leur adoption et offrent des services de soutien aux familles.

La Loi exige que vous protégiez vos enfants même si ce n’est pas vous qui les maltraitez. Si une SAE a des raisons de croire que vous ne remplissez pas votre obligation de protection, elle peut intervenir. Même si vous ne maltraitez pas vos enfants, une SAE peut intervenir si :

  • Vous étiez au courant des mauvais traitements que subissaient vos enfants ou que vous auriez dû l’être ; et
  • Vous n’avez pas tenté d’y mettre fin.

Si vous êtes victime de violence conjugale, la SAE mènera une enquête si elle craint que la violence qui vous est infligée a des effets négatifs sur la sécurité et le bien-être de l’enfant. Par exemple, la violence à laquelle est exposé un enfant peut avoir des conséquences sur son développement et son bien-être. Cela légitimera donc l’action de la SAE en vue de protéger l’enfant.

Si la police se rend chez vous, elle peut signaler la situation à une SAE. La SAE a le droit d’ouvrir une enquête : elle peut se présenter à votre domicile, vous interroger et interroger vos enfants.

Il existe beaucoup de ressources pour vous soutenir. En cas de doute, n’hésitez pas à contacter un ou une avocate. Il existe des maisons d’hébergement au cas où vous devriez quitter votre domicile rapidement (Consultez les ressources à la fin du livret).

IMPORTANT : Lorsque votre sécurité ou celle de vos enfants est compromise, n’hésitez jamais à contacter la police (911).

Quand une SAE intervient-elle?

Toute personne qui a des motifs raisonnables de soupçonner qu’un enfant peut ou pourrait avoir besoin de protection est tenue de le signaler à la SAE. C’est ce qu’on appelle le « devoir de faire rapport ». Si un ou une professionnelle qui travaille avec les enfants soupçonne qu’un enfant est victime de mauvais traitements ou de négligence, il ou elle doit appeler la SAE, à défaut de quoi il ou elle peut être déclarée coupable d’une infraction. Voici des exemples de professionnels et professionnelles qui peuvent faire un signalement :

  • Un ou une enseignante
  • Un ou une médecin
  • Un ou une travailleuse sociale
  • Une personne exerçant des responsabilités religieuses, comme un pasteur
  • Un ou une travailleuse en garderie

Cette obligation de faire rapport est un devoir permanent. Même si une personne a déjà signalé qu’un ou une enfant a été victime de mauvais traitements, elle devra le faire à nouveau chaque fois qu’elle soupçonnera qu’il y a encore maltraitance ou négligence.

La SAE peut être mise au courant de votre situation familiale si vous l’appelez pour lui demander de l’aide ou si quelqu’un d’autre la contacte comme la police ou une personne du voisinage.

Quelles sont les étapes d’intervention d’une SAE?

Étape 1 : L’évaluation

L’évaluation permet de déterminer si le dossier doit être fermé ou si une enquête est requise. Lorsque la SAE reçoit un signalement, elle fera une première évaluation pour voir si elle doit intervenir auprès de votre famille. Si la SAE est satisfaite des soins donnés à l’enfant, elle pourrait décider de fermer le dossier. C’est le cas, par exemple, quand la situation ne relève pas du droit de protection à l’enfance (p. ex. conjoint refuse de payer une pension alimentaire pour enfant) ou lorsqu’il n’y a pas de risque pour le bien-être et la sécurité de l’enfant. Cependant, si elle décide d’aller plus loin dans son intervention, elle fera une enquête.

Étape 2 : L’enquête

Après l’évaluation, la SAE peut décider de faire une enquête. Une enquête permet de déterminer si le dossier doit être fermé ou si un plan de protection doit être élaboré. Dans cette étape, un ou une intervenante de la SAE se rendra chez vous pour vous poser des questions à vous, à votre conjoint et à votre enfant.

Il ou elle peut aussi interroger d’autres personnes : les membres de la famille, le personnel enseignant ou des personnes de l’entourage. En cours d’enquête, la SAE évalue le risque de la sécurité de l’enfant dans son milieu familial ainsi que les besoins de la famille et de l’enfant.

L’enquête de la SAE est d’une importance majeure. Il faut par conséquent démontrer que vous tentez de régler le problème, sinon la SAE pourrait prendre d’autres mesures. Après enquête, la SAE peut décider que votre enfant n’a pas besoin de protection et ne prendre aucune autre mesure.

Étape 3 : Le plan de service

Si la SAE détermine que votre enfant a besoin de protection, elle doit proposer un plan d’action qui dérangera « le moins possible », c’est-à-dire qu’elle collaborera avec votre famille pour tenter de régler les problèmes et laisser l’enfant continuer à vivre chez vous. Dans la plupart des cas où la SAE collabore avec la famille, vous aurez à signer une entente indiquant ce que vous ferez pour assurer la sécurité de l’enfant ; c’est ce qu’on appelle un « plan de service ». Si on vous demande de signer un plan de service, demandez conseil à un ou une avocate.

La SAE peut retirer l’enfant de votre foyer si vous refusez de signer le plan de service ou encore si vous ne respectez pas les conditions du plan que vous avez signé. Une fois que vous avez signé le plan de service, la SAE continuera habituellement à intervenir auprès de votre famille pendant un certain temps pour s’assurer que l’enfant est en sécurité et que vous en prenez bien soin comme le prévoit le plan.

Un plan de service doit être adapté à chaque jeune et enfant

La Loi exige qu’une SAE offre des services adaptés à l’enfant en tenant compte de :

  • Sa race
  • Sa Couleur
  • Son lieu d’origine
  • Sa culture
  • Son patrimoine
  • Sa religion
  • Son handicap
  • Son orientation sexuelle et
  • Son identité de genre

La Loi détermine également l’intérêt véritable d’un enfant des Premières Nations, des peuples Inuits ou Métis. Elle prévoit la prise en compte de l’importance de son identité culturelle et de son lien avec sa communauté au moment de la prise de décision.

De plus, l’accent est mis sur l’intervention précoce afin d’éviter que les enfants et les familles n’atteignent une situation de crise à la maison. Dans la mesure du possible, une SAE va favoriser la préservation, l’autonomie et l’intégrité de la cellule familiale. D’ailleurs, ses services et l’élaboration de ses programmes devraient prendre en considération ces facteurs.

Enfin, la Loi reconnait que les enfants et les jeunes ont le droit d’être respectés et de faire valoir leur opinion sur les décisions qui les concerne. Pour ce faire, elle exige qu’une SAE mette les enfants et les jeunes au cœur de la prise de décision en les informant au sujet de leurs droits, en les aidant à comprendre ces droits et à s’en prévaloir.

Étape 4 : Le retrait de l’enfant

Si vous refusez de faire ce que la SAE vous a demandé, ou si celle-ci juge que votre enfant pourrait être maltraité, la Loi l’autorise à amener l’enfant dans un lieu sûr. Votre enfant pourrait alors être confié à un membre de la famille ou placé dans une famille d’accueil ou un foyer de groupe.

Certains types de mauvais traitements constituent des infractions au Code criminel. Plusieurs SAE ont adopté une politique exigeant que la police soit avisée chaque fois qu’une personne leur signale un cas de violence physique ou sexuelle. La police fera alors une enquête sur les allégations de violence et elle pourra déposer des accusations au criminel. Ces accusations s’ajouteront aux audiences de protection de l’enfant et ne les annuleront pas.

La SAE a le pouvoir de vous retirer un enfant à la naissance si elle s’inquiète sérieusement pour sa sécurité.  La SAE risque de vous retirer un enfant si, par exemple,

  • Elle vous a déjà retiré vos autres enfants.
  • Vous avez un grave problème de dépendance à la drogue ou à l’alcool.
  • Vous n’avez pas de logement ; ou si vous vivez dans un milieu qui n’est pas sécuritaire.
  • Vous êtes une mère adolescente, en particulier si vous avez vous-même déjà été prise en charge par la SAE (il y a de plus fortes probabilités que celle-ci vous retire votre enfant à la naissance).

Quoi faire si…

J’ai peur que quelqu’un signale mon cas à une SAE

Vous pouvez avoir de la difficulté à prendre soin de votre enfant pour plusieurs motifs. Voici quelques exemples :

  • Vous pouvez vous retrouver dans une situation de vulnérabilité et de faiblesse (p. ex. dépendance à une drogue).
  • Il est possible que votre enfant représente un défi particulier (p. ex. enfant hyperactif difficile à contrôler).
  • Votre relation avec votre conjoint s’est détériorée (p. ex. il vous frappe en présence des enfants).

Il n’existe pas de parent parfait. Ce qui est important c’est de remédier à la situation. Rappelez-vous, vous n’êtes pas seule.

Il existe des programmes d’aide pour les femmes. Nous vous invitons à consulter la page de ressources à la fin de ce livret.

De plus, il faut vous appuyer sur votre entourage. Vérifiez si un parent ou un ou une amie peut vous aider. L’appui de la famille est très important. Par exemple, si une SAE juge que vous n’êtes pas apte à avoir la garde de votre enfant, elle pourrait la confier à un membre de votre famille plus tôt qu’à un établissement ou qu’à une famille d’accueil.

Les ressources de votre communauté sont très importantes. L’école de votre enfant et les centres communautaires de votre quartier ont sans doute des ressources pour vous appuyer, vous et votre enfant.

J’ai été contactée par un représentant d’une SAE concernant mon enfant

Lorsqu’une SAE ouvre une enquête ou établit un plan de service, il est important de collaborer avec elle. Rappelez-vous qu’elle a le même objectif que vous, soit celui d’assurer le bien-être de votre enfant. Voici quelques conseils pratiques :

  • Soyez polis dans vos communications avec la SAE. Il est normal de ressentir beaucoup d’émotions y compris de la colère. Demandez de l’aide si vous avez besoin d’aide relativement à ces émotions (consulter la dernière page de ce livret).
  • Faites un résumé de ce qui vous aura été dit et de ce que vous aurez dit. De plus, prenez en note les jours où un ou une intervenante de la SAE vous aura visitée et gardez une copie de vos communications avec il ou elle dans un dossier (lettres et courriels). Il sera plus facile de faire des suivis.

Rappelez-vous, il existe des ressources. N’hésitez pas à chercher de l’aide pour qu’un ou une intervenante puisse vous accompagner dans vos démarches (voir page de ressources à la fin de ce livret).

Lorsqu’une SAE met en place un plan de protection, assurez-vous que vous avez fourni tous les renseignements nécessaires. Par exemple, les besoins de vos enfants, vos capacités et vos limites. Si vous avez dans votre entourage des personnes pouvant vous aider, n’oubliez pas de les inclure dans le plan.

Un plan n’est pas définitif.  Si la réalité change ou s’il a besoin d’être ajusté, contactez la personne assignée à votre dossier. De plus, n’oubliez pas de prendre en note vos efforts et vos améliorations.

J’ai peur qu’une SAE retire mon enfant ou mon enfant m’a été retiré

Les procédures de protection des enfants sont complexes et elles se déroulent rapidement. Si votre enfant vous a été retiré, la SAE doit présenter l’affaire à un ou une juge dans les cinq jours qui suivent. Si vous vous trouvez dans cette situation, demandez immédiatement conseil à un ou une avocate.

Si vous craignez de vous faire retirer votre enfant, vous devriez également contacter un ou une avocate.