L’aliénation parentale
Les informations mentionnées sur cette page ont pour but de vous aider à avoir une meilleure compréhension de base des notions de droit. Il ne remplace toutefois pas les conseils et l’aide d’un ou une avocate. Si vous avez des problèmes qui relèvent du droit de la famille, obtenez des conseils juridiques dès que possible afin de savoir quels sont vos choix et de protéger vos droits. Pour plus de renseignements sur la façon de trouver et de payer un ou une avocate, consultez dans Autres ressources « Comment trouver de l’aide pour régler un problème de droit de la famille ».
- Les principes de garde et de droit de visite au Canada et en Ontario
- Qu’est-ce que le « syndrome d’aliénation parentale »?
- L’aliénation parentale dans les situations de violence conjugale
- L’implication des autres services en cas d’allégation d’aliénation parentale
- Le Bureau de l’avocat des enfants
- La Société d’aide à l’enfance
- La preuve experte
- L’aliénation parentale et les impacts chez les femmes et chez les enfantse
- Les types d’ordonnances qui peuvent être rendues dans les cas d’aliénation parentale
- Que puis-je faire si on m’accuse d’aliénation parentale?
- Prendre soin de vous
Les principes de garde et de droit de visite au Canada et en Ontario
Au Canada, la loi donne aux deux parents les mêmes droits lorsqu’il s’agit d’élever leurs enfants et de prendre les décisions relatives à leur bien-être. Lorsqu’il y a séparation, la Loi sur le divorce énonce certains principes guidant les dispositions qui seront prises quant à la garde des enfants.La cour doit tenir compte entre autres, de « l’intérêt véritable de l’enfant » pour prendre une décision quant aux arrangements de garde légale et de droit de visite. Par exemple, on tiendra compte des aptitudes parentales de chacun des parents, ce qu’ils prévoient pour l’éducation de l’enfant, si le lien affectif est bon avec chacun des parents et s’il y a eu violence dans le ménage. La Loi énonce également un principe de « maximum de communication ». Selon ce principe, les enfants devraient avoir le maximum de communication avec leurs deux parents. Le parent ayant la garde des enfants a donc le devoir de faciliter le contact avec le parent qui n’a pas la garde.
La cour privilégie aussi la notion du « parent coopératif ». Une mère qui ne voudrait pas que le père ait des droits de visite, compte tenu de la violence qu’il lui aurait infligée ou aux enfants, pourrait être perçue comme un parent qui ne veut pas coopérer, alors qu’en réalité, elle tente de protéger ses enfants. On peut voir que dans les situations de violence conjugale, les différentes notions entrent parfois en conflit.
conflictuelles ou les cas de violence faite aux femmes, mais elles sont souvent imposées. Pour de plus amples renseignements, consultez le livret La garde
légale et le droit de visite (Brochure 5).
Qu’est-ce que le « syndrome d’aliénation parentale »?
Au cours des années 1980, le psychiatre américain Richard Gardner a avancé la théorie du « syndrome d’aliénation parentale », basée uniquement sur sa propre pratique clinique. Selon lui, dans les conflits de garde et de droit de visite, un parent (habituellement la mère) chercherait à influencer l’enfant et l’amener à rejeter l’autre parent (habituellement le père). L’enfant serait soumis à une sorte de « lavage de cerveau » et il développerait une haine obsessive envers l’autre parent. Les mères porteraient également de fausses accusations de violence ou d’agression à caractère sexuel contre le père.
Le « syndrome d’aliénation parentale » ne repose sur aucune théorie scientifique et plusieurs études ont déconstruit cette analyse. Cependant, il a reçu beaucoup d’attention dans les médias et a été grandement promu par les groupes de « défense des droits des pères » qui cherchaient à faire valoir leurs droits en matière de garde légale, jugeant que les cours accordaient trop souvent
la garde à la mère (avec les pensions alimentaires concordantes).
L’aliénation parentale dans les situations de violence conjugale
Une femme victime de violence a des raisons de craindre son ex-conjoint violent et d’être préoccupée de la sécurité
et du bien-être des enfants, ce qui peut l’amener à être réticente – même à s’opposer – à ce que les enfants rendent visite au père. il ne s’agit pas d’aliénation parentale lorsqu’une femme qui est victime de violence n’encourage pas le contact des enfants avec le père et ce n’est pas parce qu’elle veut convaincre les enfants de ne plus avoir une relation avec lui. C’est habituellement par peur de la violence et pour les protéger qu’elle le fait.
Il est vrai qu’il y a des situations où des parents en colère ou frustrés peuvent faire des commentaires inappropriés à leur enfant à propos de l’autre parent. il est aussi vrai qu’il y a des situations où un enfant rejette lui-même un parent pour diverses raisons, et cela sans que l’autre parent n’ait cherché à l’influencer. Souvent, les enfants qui sont témoins de violence peuvent ne pas vouloir de contact avec leur père.
Devant un enfant qui ne veut plus le voir, un ex-conjoint violent, cherchant à minimiser la gravité de ses propres
gestes, pourrait invoquer le « syndrome d’aliénation parentale », faisant ainsi porter la totalité du blâme sur son ex-conjointe pour le bris de la relation avec son enfant. Il se pourrait que la cour et les autres professionnelles ou professionnels qui travaillent en lien avec la cour de la famille soient en accord avec lui. ils percevront alors la femme comme une personne qui ne veut pas favoriser la relation, ce qui va à l’encontre du principe du « parent coopératif » mentionné ci-dessus. Aux yeux de la cour, la mère pourrait être perçue comme étant responsable du bris de la relation entre le père et ses enfants, alors qu’en réalité ce détachement peut avoir été causé par le comportement violent ou contrôlant de celui-ci.
Dans d’autres cas, un homme violent et manipulateur pourrait chercher à influencer ou inciter les enfants à rejeter leur mère en l’abaissant ou en la méprisant. en agissant ainsi, l’ex-conjoint violent continue à victimiser la femme et à exercer un contrôle sur celle-ci et sa vie.
L’implication des autres services en cas d’allégation d’aliénation parentale
Lorsqu’une partie allègue qu’il y a de l’aliénation parentale, d’autres personnes, en plus des parents, pourraient se joindre au litige pour évaluer la situation familiale et l’intérêt véritable de l’enfant.
Le Bureau de l’avocat des enfants
Le Bureau de l’avocat des enfants est un service juridique du ministère du Procureur général de l’Ontario. Ce service
juridique gratuit représente, protège et défend les droits personnels et réels des enfants de moins de 18 ans dans divers domaines du droit, notamment dans les litiges concernant la garde et le droit de visite, les instances en matière de protection de l’enfance, les affaires successorales et les procès civils.
Le rôle de la représentante ou du représentant du Bureau de l’avocat des enfants est de faire valoir devant la cour les intérêts et les souhaits des enfants.
Le Bureau de l’avocat des enfants offre des services de représentation par une avocate ou un avocat pour les enfants, ainsi que des services d’enquête qui ont pour but d’évaluer la situation familiale et d’en faire rapport à la cour de la famille.
Le Bureau de l’avocat des enfants ne prend pas de décision en matière de garde et de droit de visite. toutefois, les recommandations peuvent avoir beaucoup d’influence sur la décision d’une juge ou d’un juge quant aux questions de garde légale et de droit de visite.
La Société d’aide à l’enfance
Aux termes de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l’Ontario, les sociétés d’aide à l’enfance (SAE) ont le mandat d’intervenir lorsqu’elles considèrent qu’un enfant a besoin de protection en raison de préjudices physiques, sexuels ou psychologiques déjà causés ou à risque de l’être, y compris la négligence. étant donné leur mandat, il n’est pas rare qu’une société d’aide à l’enfance s’implique dans les cas où la question d’aliénation parentale est soulevée.
Une évaluation des compétences parentales pourrait être exigée si une société d’aide à l’enfance ou la cour le demande.
La preuve experte
il arrive fréquemment qu’une preuve experte soit présentée à la cour de la famille lors d’allégations d’aliénation parentale. elle peut être présentée par des psychiatres, des psychologues, des travailleuses sociales ou des travailleurs sociaux, des conseillères ou des conseillers en santé mentale ou toute autre personne qui a les connaissances nécessaires.
L’objectif de la preuve experte est de fournir de l’information à la cour afin que la juge ou le juge puisse prendre une décision éclairée.
L’aliénation parentale et les impacts chez les femmes et chez les enfants
Les impacts chez les femmes et chez les enfants sont néfastes et nombreux.
Lorsque le père se dit victime d’aliénation parentale et blâme son ex-conjointe, celle-ci pourrait être perçue comme l’agresseure et non la victime aux yeux de la juge ou du juge et des différentes personnes impliquées dans le litige.
Il se peut qu’elle sente qu’on discrédite ses propos, ses perceptions et ses choix. elle sentira peut-être qu’on n’est pas à l’écoute de ses inquiétudes et qu’on interprète mal ses intentions de protéger ses enfants, et qu’on l’accuse de nuire au père et aux enfants.
Les enfants pourraient se retrouver à vivre la même chose que leur mère. Peu importe ce qu’ils rapporteraient comme comportements inacceptables, voire abusifs, de la part du père, ils pourraient ne pas être crus. On supposera – et parfois on leur dira ou leur suggérera – que c’est leur mère qui leur a dit de dire ceci ou cela, ou qui leur a mis « des idées dans la tête ».
La mère et les enfants peuvent donc vivre un fort sentiment d’impuissance qui pourrait aller en augmentant.
Plus ce sentiment d’impuissance grandira, plus des symptômes apparaîtront ou s’amplifieront, par exemple : anxiété, dépression, tendances suicidaires, incontinence fécale, fugues, agressivité, automutilation, dissociation, etc.
Lorsque les symptômes des enfants sont apparents ou s’aggravent, la mère risque d’être blâmée davantage pour l’aliénation parentale, ce qui accroît son sentiment d’impuissance qui peut éventuellement se transformer en désespoir, surtout lorsque ça dure depuis des années.
Dans bien des cas, on ne prend pas en considération la violence, et des enfants sont forcés à visiter le père violent. La mère doit accepter la décision de la cour et obliger ses enfants à aller voir leur père, même si elle sait que cela est néfaste et pourrait être dangereux (psychologiquement ou physiquement) pour eux. Lorsqu’ils sont avec leur père, elle peut être inquiète et malheureuse et peut se sentir coupable. Les enfants quant à eux peuvent se demander pourquoi les adultes ne les croient pas et ne les protègent pas. ils risquent de se sentir abandonnés et trahis. La mère et les enfants finissent par perdre confiance dans les systèmes qui sont censés les défendre et les protéger.
Les types d’ordonnances qui peuvent être rendues dans les cas d’aliénation parentale
Une juge ou un juge pourrait rendre une ordonnance demandant aux parties d’assister à des séances de counseling. Plus précisément, une juge ou un juge pourrait ordonner :
- Des séances de counseling entre l’enfant et le parent rejeté afin de tenter de rétablir la relation entre eux
- Des séances de counseling seulement pour l’enfant
- Des séances de counseling seulement pour le parent « aliénant »
- Des séances de counseling pour le parent qui accuse l’autre d’aliénation parentale
- Des séances de counseling pour tous les membres de la famille
Il se pourrait, dans des cas plutôt extrêmes, qu’une juge ou qu’un juge modifie l’ordonnance de garde et accorde la garde de l’enfant au parent qui se plaint d’avoir été
« aliéné » et rejeté par l’enfant. il doit toutefois exister suffisamment de faits démontrant que la décision est dans le meilleur intérêt de l’enfant.
Finalement, une juge ou un juge pourrait interdire tout contact pour une période déterminée entre le parent rejeté et l’enfant, ou encore entre le parent trouvé coupable d’aliénation parentale et l’enfant. La cour pourrait aussi ordonner une garde conjointe malgré le fait qu’il pourrait être difficile pour les parents de collaborer. La cour pourrait aussi ordonner des droits de visites supervisées ou non supervisées selon les circonstances.
Que puis-je faire si on m’accuse d’aliénation parentale?
- M’informer à savoir ce qu’est l’aliénation parentale
- Comprendre le lien entre l’aliénation parentale et la violence faite aux femmes
- Documenter tous les incidents de violence
- Faire appel aux services pour femmes victimes de violence qui pourront me fournir des informations, m’aider à élaborer un plan de sécurité pour moi et mes enfants, m’offrir du soutien, de l’accompagnement, m’aider à défendre mes droits
- Faire appel aux services pour enfants exposés à la violence qui pourront aider et soutenir mes enfants
Prendre soin de vous
Le processus à la cour de la famille peut être une étape difficile et éprouvante. il se peut qu’il y ait des moments
où vous ressentirez de l’impuissance, de la frustration et de la peine. C’est pour cela qu’il est important d’être bien représentée par une avocate ou un avocat qui de préférence connaît les enjeux de la violence faite aux femmes, incluant
l’aliénation parentale et d’avoir le soutien d’une intervenante d’un service pour les femmes victimes de violence. il serait
bien, si possible, d’obtenir aussi le soutien d’un membre de votre famille ou d’une amie ou d’un ami.
La sensibilisation et l’éducation au sujet de la violence faite aux femmes sont importantes dans tous les secteurs (juridique, protection de l’enfance, etc.) afin de prévenir que de la crédibilité soit accordée à de telles allégations, faites contre les femmes qui cherchent à protéger leurs enfants.