LE RECOURS DEVANT LA COUR CRIMINELLE APRÈS UNE AGRESSION SEXUELLE

L’information présentée ici vise à vous expliquer les différentes étapes du processus judiciaire après une agression sexuelle.

Il est important de savoir que les procédures de la Cour criminelle visent à déterminer si la personne qui est accusée est coupable ou innocente au sens technique et légal du terme.

En droit criminel, la Couronne doit prouver que la personne est coupable hors de tout doute raisonnable.

Il arrive donc que les personnes qui ont commis des actes criminels ne soient pas trouvées coupables. Cela ne signifie pas que vous n’avez pas été victime d’une agression sexuelle.

Rappelez-vous que le système judiciaire criminel est centré sur l’agresseur et non sur vous, la victime. Vous serez considérée comme un témoin. Cela peut être frustrant pour les victimes qui ne sont pas toujours informées de ce qui se passe et qui peuvent croire qu’on ne tient pas compte de leurs besoins ou qu’elles sont écartées. Durant toute la procédure, vous serez appelée la « plaignante », parce que vous portez plainte et l’agresseur sera appelé « l’accusé ».

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Recours devant la Cour criminelle

 

 

Vous et la procureure ou le procureur de la Couronne

Une fois que les accusations sont portées contre l’agresseur, le dossier sera transmis à la procureure ou au procureur de la Couronne (l’avocate ou l’avocat poursuivant l’agresseur).

La procureure ou le procureur de la Couronne n’est pas votre avocate ou avocat et ne représente pas vos intérêts, mais ceux de la société. il peut donc arriver qu’elle ou il prenne des décisions avec lesquelles vous n’êtes pas d’accord. Par exemple, elle ou il pourra décider de poursuivre la procédure, même si vous voulez qu’elle soit abandonnée, ou au contraire, d’abandonner les poursuites criminelles même si vous voulez les continuer.

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Le Programme d’aide aux victimes et aux témoins

Le Programme d’aide aux victimes et aux témoins fait partie du bureau du procureur de la Couronne. Le personnel vous aidera à comprendre le processus et facilitera la relation avec la procureure ou le procureur de la Couronne. Il vous informera des conditions de libération qui ont été imposées à l’agresseur, des dates de comparution ou de tout autre renseignement pertinent. Il vous préparera également à témoigner.

Tout au long de la procédure, vous pouvez communiquer avec le personnel du programme pour avoir de l’information. Pour trouver le bureau le plus près de chez vous, appelez la Ligne d’aide aux victimes au 1 888 579-2888 – ATS 416 325-4935 ou au 416 314-2447.

Attention : Comme le Programme d’aide aux victimes et aux témoins fait partie du bureau duprocureur de la Couronne, il est soumis aux règles de divulgation. Tout ce que vous direz au personnel sera transmis à la procureure ou au procureur de la Couronne qui pourrait être obligé de le transmettre à la défense.

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Les accusations

En droit criminel, les accusations sont portées par la Couronne et non par la victime. des accusations seront portées après votre plainte si la procureure ou le procureur
pense avoir suffisamment de preuves pour faire condamner l’accusé.

Il existe plusieurs accusations possibles selon ce qui vous est arrivé, notamment l’accusation d’agression sexuelle, de voie de fait, de harcèlement criminel, de profération de menaces, d’inceste…

Note : Une personne peut être accusée d’une agression sexuelle commise il y a plusieurs années. Cependant, elle sera accusée en vertu de la loi en vigueur au moment de l’agression et non pas en vertu de la loi en vigueur aujourd’hui.

 

La libération sous caution de l’accusé

Il arrive que l’agresseur soit libéré dans l’attente de son procès. La police peut choisir de libérer l’accusé avec un engagement de se présenter en cour à une date future pour faire face à ses accusations. Si cela est le cas, il aura certaines conditions à respecter, par exemple, ne pas
avoir de contact avec vous, ne pas se présenter à votre résidence ou votre lieu de travail, ne pas consommer de l’alcool ou ne pas posséder d’armes.

L’accusé peut aussi être libéré suite à son audience de cautionnement (ou de libération provisoire) qui a habituellement lieu un jour ou deux après que des accusations ont été portées. La juge ou le juge de paix décidera si l’accusé devrait être remis en liberté
en tenant compte des critères suivants :

  1. L’accusé se présentera-t-il en cour?
  2. Est-ce que l’accusé pose un danger à la victime ou au public?
  3. Est-ce qu’il y a une grande probabilité que l’accusé commette une infraction criminelle?

Si l’accusé est remis en liberté suivant cette audience, il aura des conditions à respecter tant que les procédures criminelles ne seront pas terminées. S’il ne les respecte pas, il pourra être accusé de nouveau et détenu jusqu’à la fin de la procédure criminelle. Vous pouvez obtenir une copie des conditions de libération. n’hésitez donc pas à appeler la police si l’agresseur ne respecte pas l’une de ces conditions.

Seul l’accusé est tenu de se conformer aux conditions de libération. Vous n’y êtes pas obligée. Cependant, on vous recommande de les respecter, notamment celle concernant l’interdiction de communication, pour éviter de porter atteinte à votre crédibilité. Si vous devez ou voulez communiquer avec l’accusé pendant le déroulement de la procédure, vous pouvez demander l’aide du Programme d’aide aux victimes et aux témoins.

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Le plaidoyer de culpabilité

Chaque personne accusée en vertu du Code criminel a le choix de plaider coupable ou non coupable. L’avocate ou l’avocat de l’accusé et la procureure ou le procureur de la Couronne vont donc se rencontrer pour discuter de la preuve et pour étudier la possibilité de négocier
un plaidoyer de culpabilité.

Il arrive souvent que l’accusé choisisse de plaider coupable en échange d’une réduction de peine ou de plaider coupable à une accusation moins grave. Avant de négocier, la procureure ou le procureur pourrait demander votre opinion, mais elle ou il n’est pas tenu de le faire
ou de suivre votre opinion. Un plaidoyer de culpabilité pourrait donc être négocié même si vous êtes contre.

Si l’accusé choisit de plaider coupable, l’étape suivante est le prononcé de la sentence : la ou le juge déterminera la peine appropriée en tenant compte de votre opinion et de l’impact que l’agression a eu sur votre vie.

Si l’accusé choisit de plaider non-coupable, il y aura une enquête préliminaire suivie d’un procès ou directement un procès.

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La procédure sommaire et la mise en accusation

Pour plusieurs accusations reliées à des délits sexuels, la Couronne a le choix de traiter l’affaire par procédure sommaire ou par mise en accusation. dans ce cas encore,
la Couronne n’est pas obligée de demander votre opinion,
ni de la respecter.

Lors d’une procédure sommaire, une affaire est jugée par une ou un juge et la peine maximale de prison encourue est de 18 mois. Habituellement, la Couronne choisit une procédure sommaire pour les cas moins graves ou lorsque c’est la première infraction du genre de l’accusé.

Lors d’une mise en accusation, la peine maximale de prison encourue est de dix ans et l’accusé a le choix d’être jugé par une ou un juge siégeant seul ou par un jury assisté par une ou un juge. La Couronne procède par mise en accusation dans les cas plus graves ou lorsque l’accusé a déjà commis d’autres infractions du genre.

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L’enquête préliminaire

Si la Couronne choisit de procéder par mise en accusation, l’accusé a le droit de demander une enquête préliminaire avant son procès. L’objectif est de déterminer si la Couronne possède suffisamment de preuves pour justifier la tenue d’un procès. La procureure ou le procureur doit présenter ses éléments de preuve et ses témoins. Vous pourrez donc être appelée à témoigner lors de l’enquête préliminaire. La défense a ensuite la possibilité de contre-interroger les témoins.

Le déroulement d’une enquête préliminaire est très semblable à celle du procès, mais l’objectif est différent : lors du procès, on va déterminer si l’accusé est coupable alors que lors de l’enquête, on va établir si les preuves sont suffisantes.

Si la ou le juge détermine qu’il n’y a pas suffisamment de preuves, les accusations seront levées. Si la ou le juge détermine qu’il y a suffisamment de preuves, l’accusé ira en procès.

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LE PROCÈS

Quand le procès aura-t-il lieu?

En théorie, le procès devrait avoir lieu dans les six à neuf mois suivant le dépôt de l’accusation. Malheureusement, les délais sont souvent plus longs, notamment parce que les tribunaux sont très occupés et parce que l’accusé peut demander des ajournements, le temps par exemple de faire une demande d’aide juridique ou de trouver une avocate ou un avocat. des ajournements pourront également être demandés par l’avocate ou l’avocat de la défense afin qu’elle ou il ait le temps de recevoir les preuves au dossier (la divulgation). Ces différentes comparutions peuvent retarder de plusieurs mois la date du procès.

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Y aura-t-il un jury?

Si la Couronne procède par procédure sommaire, il n’y a pas de jury. L’affaire est entendue par une ou un juge.

Si la Couronne procède par mise en accusation, l’accusé choisit s’il y a un jury ou non. il peut décider d’être jugé seulement par une ou un juge ou par un jury assisté d’une ou un juge.

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En quelle langue aura lieu le procès?

Un accusé qui comparaît devant la Cour criminelle a le droit de choisir en quelle langue le procès aura lieu.

Il peut choisir l’anglais ou le français. Si une ou un des témoins ne parle pas la langue choisie, la Cour fera appel à une ou un interprète. Ainsi, si vous êtes appelée à témoigner et que vous ne parlez pas ou ne comprenez pas la langue choisie pour le procès, les questions et vos réponses seront traduites. Cette procédure peut être difficile pour certaines femmes parce que la transmission de leur témoignage dépend d’une ou d’un intermédiaire.

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Comment se déroulera le procès?

Un procès se déroule en différentes étapes:

    1. La Couronne appelle les témoins (interrogatoire principal)
    2.  La défense contre-interroge les témoins de la Couronne (contre–interrogatoire)
    3. La défense appelle des témoins (s’il y a lieu)
    4. La Couronne contre-interroge les témoins de la défense
    5. Chacune des parties fait son exposé final
    6. Le jury ou la ou le juge donne son verdict

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Qu’est-ce qu’un interrogatoire et contre-interrogatoire?

On parle d’interrogatoire lorsque la procureure ou le procureur de la Couronne pose des questions à ses propres témoins. Dans ce cadre, vous serez peut-être appelée à témoigner de ce qu’il s’est passé. Vous recevrez alors une assignation à comparaître à la cour. il est illégal de ne pas respecter cette ordonnance. Vous devez donc aller témoigner.

On parle de contre-interrogatoire lorsque l’avocate ou l’avocat de la défense vous pose des questions. Le contre-interrogatoire est souvent la partie la plus difficile du procès. L’avocate ou l’avocat de la défense tentera de vous discréditer, même si en théorie, elle ou il n’est pas censé le faire. La procureure ou le procureur pourra s’objecter aux questions inappropriées et la ou le juge pourra vous dire de ne pas répondre.

Voici quelques éléments qui pourraient vous aider lors du contre-interrogatoire :

  • Vous concentrer sur ce que vous savez .
  • Ne jamais mentir.
  • Dire que vous ne vous souvenez pas quand vous n’êtes pas certaine de la réponse.
  • Faire tout ce que vous pouvez pour vous sentir à l’aise : porter des vêtements que vous aimez, parler lentement, boire de l’eau, faire des pauses, demander un arrêt momentané des procédures.
  • Certaines femmes trouvent qu’il est utile de concentrer leur attention sur une personne qui se trouve dans la salle, qui les soutient et qui croit leur histoire.
  • Vous dire que la ou le juge ou le jury pourra faire la différence entre la vérité et la malhonnêteté.
  • Vous dire que le rôle de l’avocate ou de l’avocat de la défense est de tenter de vous discréditer.

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Ma vie sexuelle sera-t-elle étalée en cour?

Par le passé, au cours d’un procès, il était presque toujours question de la vie sexuelle de la plaignante. Aujourd’hui, par contre, la loi a changé et les antécédents sexuels ne peuvent être évoqués que s’ils sont directement liés à l’accusation qui est jugée (par ex., le fait que l’accusé et la victime ont eu des relations sexuelles de même nature, consenties dans le passé).

Malheureusement, dans certains tribunaux, on dévoile encore les antécédents sexuels de la victime au cours du procès, même si cela n’est aucunement relié à la cause.

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Mes dossiers personnels seront-ils utilisés en cour?

La défense peut faire une requête pour demander à la cour d’avoir accès aux dossiers personnels comme un journal intime, un dossier médical ou les notes d’une thérapeute.

La personne qui a constitué ces dossiers (vous ou votre thérapeute) recevra alors un avis de la cour et aura l’occasion d’expliquer à la juge ou au juge pourquoi ces dossiers ne devraient pas être fournis à l’avocate ou l’avocat de la défense. À la suite d’affaires récentes et à des modifications apportées au Code criminel, ce type de requête risque d’être moins accordé que par le passé.

Si vous souhaitez avoir plus d’information à ce sujet, n’hésitez pas à appeler la ligne Fem’aide ou un centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS).

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Qu’est ce que la Couronne doit prouver?

La Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable que l’accusé a commis l’agression. Bien que ce terme soit difficile à définir précisément, il signifie essentiellement que la Couronne doit démontrer que la seule explication raisonnable est que l’accusé est coupable.

Attention : L’accusé n’a pas à prouver qu’il n’a pas commis un acte criminel. La Couronne doit prouver qu’il a commis un acte criminel.

Au cours du procès pour agression sexuelle, il doit être prouvé :

1. que l’accusé avait l’intention de vous toucher
2. que l’accusé n’a pas tenu compte de votre manque de consentement
3. que cet acte s’est réellement produit

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Comment l’agresseur se défendra-t-il?

La défense la plus courante est celle énonçant que la plaignante a consenti à l’activité sexuelle. Il est en effet difficile pour la Couronne de prouver l’absence de consentement parce que, souvent, il n’y a pas d’autres témoins. Il y a donc deux versions contradictoires : celle de la victime et celle de l’accusé. Comme il existe encore de nombreux mythes et préjugés au sujet des agressions sexuelles, il est parfois difficile pour une ou un juge ou pour un jury de croire qu’il n’y a pas eu de consentement.

La deuxième défense possible est la « croyance sincère, mais erronée », c’est-à-dire que l’accusé croyait honnêtement que la victime avait consenti à l’activité sexuelle. L’agresseur va essayer de prouver qu’il a pris les démarches nécessaires pour s’assurer du consentement et qu’il a sincèrement cru que la victime était consentante.

Il arrive aussi parfois que la défense tente de présenter des arguments basés sur des mythes et stéréotypes. Par ex., une femme qui est active sexuellement avec plus d’un partenaire consent à toutes les relations; une femme, par ses vêtements ou son comportement, peut être provocante et ne doit pas être surprise si une agression se produit; ce n’est pas une agression sexuelle lorsqu’on a pris de l’alcool ou des drogues.

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Le verdict

À la suite du procès, que ce soit devant une ou un juge seul ou devant un jury, il y aura un verdict de culpabilité ou de non-culpabilité.

Si l’accusé est trouvé non coupable, l’affaire est close. Toutes les conditions qui lui avaient été imposées, comme l’interdiction de vous approcher, ne s’appliquent plus.

S’il est trouvé coupable, le procès passe à l’étape de la détermination de la peine.

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La détermination de la peine

Les peines imposées pour des agressions sexuelles varient beaucoup et dans certaines circonstances, elles peuvent sembler minimales. En fonction de la gravité de l’infraction, un accusé pourrait recevoir une absolution avec ou sans condition, ce qui signifie qu’il n’aura pas de casier judiciaire, alors qu’un autre accusé pourrait être emprisonné pour plusieurs années.

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Comment décide-t-on de la peine?

Une personne trouvée coupable d’agression sexuelle est passible d’une peine pouvant aller jusqu’à :

  • dix ans de prison pour une condamnation lors d’une
    mise en accusation
  • 18 mois de prison pour une condamnation par procédure sommaire

Lors de l’audience pour déterminer la peine, la ou le juge écoutera les arguments de la Couronne et de l’avocate ou de l’avocat de la défense afin de prendre sa décision sur la peine appropriée. Elle ou il tiendra compte de plusieurs facteurs incluant la gravité de l’infraction, les blessures subies par la victime, les antécédents de l’accusé, les circonstances de l’agression. Si le Code criminel prescrit une peine d’emprisonnement minimale, elle ou il devra la respecter.

Dans la plupart des situations, la peine inclura une période de probation qui peut avoir une durée maximale de 3 ans. Pendant cette période, l’agresseur devra se rapporter à une agente ou à un agent de probation et suivre certaines conditions (par ex., interdiction de communiquer avec vous, de consommer de l’alcool ou de posséder des armes, obligation de suivre un traitement pour la gestion de la colère, etc.). Si l’agresseur ne respecte pas ces conditions, il pourrait être poursuivi.

Vous pouvez donc signaler le non-respect de ces conditions à son agente ou agent de probation.

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Quel sera mon rôle dans la détermination de la peine?

Vous pouvez soumettre une déclaration de la victime dans laquelle vous pourrez décrire les répercussions que l’agression a eues sur vous. Vous pouvez soumettre cette déclaration par écrit ou la lire à haute voix lors de l’audience si vous vous sentez à l’aise pour le faire.

Sachez que votre déclaration sera remise à l’avocate ou l’avocat de la défense et qu’elle ou il pourrait vous contre-interroger.

Si vous n’êtes pas prête à accepter cette procédure, la déclaration ne sera pas remise à la juge ou au juge.

Attention : Vous ne devez pas soumettre votre déclaration de la victime avant que l’accusé soit déclaré coupable. Si vous la remettez à la procureure ou au procureur de la Couronne avant ou au cours du procès, elle sera remise à la défense.

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Les appels

La Couronne, comme la défense, peut faire appel du verdict ou de la sentence. ils ont 30 jours après la fin du procès pour déposer un « avis d’appel ». La Couronne peut vous consulter avant de faire ou non appel. Cependant, elle n’est pas obligée de respecter votre volonté.

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